Je ne partage que le meilleur des spectacles que je vois. Ce n’est pas toujours une réussite. Voir un désastre. Une prise d’otage.
Un samedi soir de décembre, j’ai eu des places pour une pièce de théâtre. J’ai accepté avec plaisir. Toujours curieuse de découvrir un nouveau spectacle. C’était La double inconstance de Marivaux.
Subir une vision du monde
La pièce a commencé et c’est devenu mon pire cauchemar. C’était horrible. Pendant deux heures, j’ai dû supporter un texte de marivaudage classique transformé en rapport de domination et soumission entre hommes et femmes par le metteur en scène.
Je ne me suis pas assise pour entendre des acteurs crier. J’ai eu l’impression d’être prise en otage par la vision du metteur en scène. Je n’ai pas eu le réflexe de sortir car je n’étais pas seule et coincée au milieu du parterre. Par respect du travail des acteurs et aussi par peur, je suis restée. Collée à mon siège à entendre un texte.
Plus le temps passe et plus je me demande : Pourquoi est-ce-que je me suis imposée ça ? Est ce que je devais subir ou partir ? Est ce que c’est une forme de violence psychologique ? Je m’en veux et j’en veux aussi au metteur en scène d’avoir eu cette lecture de la pièce.
Je m’en veux de ne pas être sortie quand ça devenait trop difficile. J’en veux aussi au théâtre de ne pas avoir prévenu que certaines scènes étaient violentes (peut- être pas pour eux),
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Je ne vais pas au cinéma au hasard. Je suis très sensible aux images et j’évite tout film violent. En première, je suis allée au cinéma avec ma classe de français voir Jeanne d’arc de Luc Besson. La scène de viol au début du film a été insoutenable à regarder, je voulais sortir de la salle mais je ne l’ai pas fait. Pas assez armée à l’époque pour comprendre que l’on peut refuser d’être confronté à la violence.
Des années après, il vient de m’arriver la même chose au théâtre et j’ai agi de la même façon : je suis restée. Je me questionne beaucoup : n’est-ce pas une forme de domination d’imposer sa vision du monde à un public captif, qui ne peut partir ?
Être actrice
J’aime toutes les formes de culture. Les arts m’eveillent et m’équilibrent. Dorénavant, je refuse de subir la domination d’un réalisateur ou d’un metteur en scène. Aucune idée de censure dans mes propos. Je serai plus vigilante à ce que je vais voir et je partirai s’il le faut.
Cette prise de risque d’être confrontée à la violence non voulue, la littérature nous protège. A tout moment, on peut refermer le livre, dire non, le balancer à l’autre bout de la pièce et s’en débarrasser.
Et vous, comment gérez-vous ces situations ?
La pièce non recommandée
La Double inconstance de Marivaux mis en scène par Galin Stoev.