Fief de David Lopez
Aujourd'hui, le Prix du Livre Inter est le livre chroniqué : Fief de David Lopez. Un bon premier roman.
Nul part ailleurs
Ce roman est remarquable par son style littéraire et son écriture. L'auteur a su retranscrire le parlé d'une génération dans un style très personnel et imagé. Ce livre est très différent des autres livres que j'ai lus. Son style est particulier. Actuel. Dans quelques années, il sera daté ou culte.
"Il cendre. Il tire une latte, il cendre, il souffle la fumée, il cendre. Il soupire, il cendre. Je le regarde avec un rictus et il dit Jonas j'te jure, j'ai pas fait exprès, et il a quand même un sourire ambivalent sur la face, ça fait que ce n'est pas facile de le situer ce garçon, on ne sait jamais si c'est un insouciant plein d'innocence ou un authentique fils de pute."
L'ennui comme personnage principal
Ce livre est dédié à l'ennui et au recours du joint pour le tromper. La bande de potes du héros, Jonas, vit dans un entre-deux de ville et campagne. Une zone oubliée qui se rappelle à nous avec les manifestations des gilets jaunes (Comment en sommes-nous arrivés là ?)
"On habite une petite ville, genre quinze mille habitants, à cheval entre la banlieue et la campagne. Chez nous, il y a trop de bitume pour qu'on soit de vrais campagnards, mais aussi trop de verdure pour qu'on soit de vraies cailleras.[] Au regard des villages qui nous entourent, on est des citadins par ici, alors qu'au regard de la grande ville, située à un peu moins de cent kilomètres de là, on des culs-terreux."
Sans intrigue dans le roman, David Lopez arrive à faire que l'ennui devient le personnage principal de son livre. Les personnages n'ont pas de quête, pas de projet, pas de boulot si ce n'est se retrouver dans leur fief et fumer.
Vous avez envie de le lire ?
Résumé de la maison d'édition
Quelque part entre la banlieue et la campagne, là où leurs parents ont eux-mêmes grandi, Jonas et ses amis tuent le temps. Ils fument, ils jouent aux cartes, ils font pousser de l’herbe dans le jardin, et quand ils sortent, c’est pour constater ce qui les éloigne des autres.
Dans cet univers à cheval entre deux mondes, où tout semble voué à la répétition du même, leur fief, c’est le langage, son usage et son accès, qu’il soit porté par Lahuiss quand il interprète le Candide de Voltaire et explique aux autres comment parler aux filles pour les séduire, par Poto quand il rappe ou invective ses amis, par Ixe et ses sublimes fautes d’orthographe. Ce qui est en jeu, c’est la montée progressive d’une poésie de l’existence dans un monde sans horizon.
Au fil de ce roman écrit au cordeau, une gravité se dégage, une beauté qu’on extirpe du tragique ordinaire, à travers une voix neuve, celle de l’auteur de Fief.
Fief de David Lopez aux éditions Seuil et aux éditions Points en livre de poche